La mondialisation des échanges (en particulier culturels et informationnels) et plus près de nous, la construction européenne, accompagnées d’une certaine libéralisation des sociétés occidentales, ont accompagné l’émergence de clubs sportifs LGBT+. Ces clubs avaient pour but de permettre aux minorités sexuelles/de genre, de pouvoir pratiquer une activité sportive dans un environnement bienveillant et inclusif. Rapidement, sont nés aux Etats-Unis les Gay Games, juste après les JO à Los Angeles en 1984. S’est répandue l’idée de créer des fédérations, y compris en Europe (EGLSF en 1992), pour structurer ce mouvement, et participer à des rassemblements internationaux, sur le modèle de ou aux Gay Games. Sont dans cette logique nés les Eurogames, en 1992. Ils ont eu lieu en 1997 à Paris, et c’est, pour ce qui nous intéresse, l’impulsion qui a permis aux clubs d’arts martiaux européens de véritablement créer des liens : karaté à Paris (Karaboom puis Niji-Kan), à Münich (Bushido), à Amsterdam (Tijgertje) et Berlin (Gaysha) entre autres. Il faut également citer Londres, avec le club de jiu-jitsu Ishigaki, et Cologne, avec Janus (association multisports ayant un club de Taekwondo et de boxe thai, et plus récemment de Krav-Maga).
Tous les clubs (et en particulier les clubs pratiquant des arts martiaux traditionnels) n’ont pas forcément une appétence développée pour la compétition. Sous l’impulsion de Bushido à Münich, s’est alors créé un évènement appelé “Pink Power”, dont la philosophie est de proposer des ateliers de découverte des disciplines pratiquées par les clubs amis. Cela permet, sur un ou deux jours, de découvrir différents styles de karaté ou de combat pied-poing, de la self-defense, des discipines au sol etc… ainsi que de se faire des amis, parfois pour la vie, tout en découvrant les cultures des villes européennes où ces évènements se tiennent (je pense que les Pink Power ayant lieu à Münich pendant la fête de la bière sont ceux qui ont eu le plus de succès). En dehors de Münich, des Pink Power ont été organisés à Londres, Cologne, Berlin et bien sûr Paris, à au moins deux reprises. Pour des raisons pratiques, en tout cas à Paris et Cologne, ils ont pu être organisés au sein d’un évènement plus large, comme par exemple le TIP : seule une mini-compétition de kata était organisée le samedi matin, et ensuite il n’y avait que des ateliers.
Pour Niji-Kan, la période où les relations ont été les plus régulières est celle du début des années 2000, jusqu’aux Gay Games de Cologne en 2010. En effet, des Pink Power ont été organisés presque annuellement, en particulier en Allemagne, et des liens forts ont été créés, d’abord avec Münich, puis Cologne, où des adhérents de Niji-Kan se sont rendus régulièrement pour participer au carnaval en février.
Le développement du TIP, l’arrivée d’autres clubs aux disciplines voisines (lutte, judo, puis boxe) mais à la philosophie différente, et l’approche des Gay Games, d’abord à Cologne en 2010, puis Paris en 2018, ont pu diluer l’identité du Pink Power, dans quelque chose de plus large, et parfois orienté compétition.
Ensuite, le COVID, et un changement générationnel dans les clubs d’arts martiaux européens, ont mis en pause cet évènement. Aujourd’hui, avec la montée globale des extrémismes, la dégradation des relations internationales, le risque de guerre et le retour des nationalismes, plus que jamais il nous semblait important de ré-organiser un Pink Power et de resserrer des liens avec les clubs européens. C’est pourquoi les Eurogames de Lyon intègrent des ateliers découverte. Mais auparavant, Janus à Cologne fête ses 25 ans, et organise un ensemble d’ateliers d’arts martiaux, dont la philosophie est proche de celle du Pink Power. C’est l’occasion de recréer des liens avec des partenaires historiques, et pour les plus jeunes d’entre vous, de découvrir une très belle ville européenne, très vivante. A vous de jouer !
Marie B.