Portrait de Sophie

Chaque mois, votre newsletter vous propose de découvrir les réponses d’un membre du club au « questionnaire du karateka », dit aussi « portrait chinois de karatékas », conçu par Sophie.

Aujourd’hui, Sophie s’est avisée qu’elle n’avait jamais répondu à son propre questionnaire et a décidé de jouer l’arroseuse arrosée.

Après avoir commencé par les senseis et les ceintures noires (respect, toujours !), nous ouvrons à présent le questionnaire à tou·tes : n’hésitez pas à ajouter des questions auxquelles vous rêver de répondre, à en supprimer d’autres si ça vous chante et envoyez vos réponses à srabau [at] free.fr

Yoï ! Tenez-vous prêt·es !

Quel est ton premier souvenir de karaté ?

[Sophie] Une amie, prof de karaté, m’a fait faire un kata dans le jardin de ma maison familiale, à Bordeaux. J’ai déclaré que moi j’aimais pas la danse et que je détestais ça. Un grand moment de lucidité, quoi !

Te souviens-tu de ton premier passage de grade (et peux-tu nous en dire deux mots) ?

[S] Mon premier passage de grade en Shotokan, je me suis plantée sur un mouvement du premier kata, sans m’en rendre compte. On m’a demandé de refaire l’enchaînement et comme il y a une ange gardienne qui veille sur les karatékas débutantes, je l’ai refait correctement. A Niji-Kan, j’ai confondu jodan et chudan et on va dire pudiquement que mon erreur s’expliquait par une mauvaise compréhension de la prononciation du japonais. Ah oui j’oubliais :  dans les deux cas, j’étais morte de trouille.

Le premier dan (la ceinture noire), pour toi, c’est une utopie, un rêve, un horizon lointain, un projet, un jour peut-être, après-demain, impossible, pas pour toi, autre chose ?

[S] Tout·es les pratiquant·es avancé·es disent que la ceinture noire, c’est le moment où l’on commence vraiment le karaté. Alors disons que oui, j’aimerais bien, un jour, commencer le karaté !

Allez, on arrête, de parler de la ceinture noire. Est-ce que tu as une ambition, un projet, un rêve en venant pratiquer, ou est-ce que tu attends de voir venir ?

[S] Alors j’avais une ambition secrète : faire partie des rares élu·es dont Christian Sensei utilise le nom propre pour désigner un défaut attaché à leur personne. Et voici que mon rêve est devenu réalité au dernier cours : Christian Sensei a officiellement utilisé l’expression « un Sophie » pour parler de l’art difficile de passer les hanches avec énergie sans avoir d’abord placé ses pieds dans la bonne position, ce qui entraîne au mieux un déséquilibre, au pire une chute. Je suis très fière…

Cela dit, j’ai une autre ambition : ne plus faire de « Sophie » !

Quel est ton plus beau souvenir de karatéka, à ce jour ?

[S] C’est un tout petit souvenir : un jour, au moment où un sensei me regardait j’ai bien fait le mouvement demandé et au moment où je sentais que c’était ça j’ai senti que le sensei pensait que c’était ça. Et cette heureuse coïncidence, si rare, était réjouissante.

J’ai aussi un bon souvenir des cours de karaté en visio que faisait Marie pendant le confinement parce que 1) je n’ai jamais été aussi bonne en karaté (évidemment personne ne me voyait et je pouvais me la raconter ! ) 2) le chat de Marie, parfaitement indifférent à nos efforts et à ceux de sa maîtresse pour nous montrer les enchaînements, paradait devant la caméra qu’il obstruait majestueusement et ça me faisait rire 3) c’était un petit miracle, ce lien maintenu alors qu’on était enfermé et un peu plus tard aussi ,durant la même période, quand on a été quelques un·es à reprendre les entraînements dans le parc de Bercy,  toujours grâce à Marie.

Et ton pire souvenir (si tu en as un) ?

[S] Lors de mon dernier passage de grade, j’avais un seul objectif : montrer à Christian Sensei que j’avais travaillé la stabilité, que c’était pas encore ça, mais qu’enfin je faisais attention à ne pas faire ce qu’on appelait pas encore des « Sophie ». Pour le kihon et le passage du premier kata, ce n’était pas brillant, bien sûr, mais enfin j’ai été à peu près stable, n’ai pas trop mis les hanches avant les pieds, et sur ce point, au moins, j’étais contente. Et puis arrive le second kata : Christian Sensei me demande PINAN SANDAN et, comme une imbécile, je m’étais mis en tête que ça serait PINAN SHODAN ou PINAN NIDAN. Je me retrouve donc déstabilisée moralement et… évidemment, physiquement : belle perte d’équilibre. Je m’en suis terriblement voulu et j’étais triste de décevoir mon sensei,  au point qu’au TIP suivant j’ai refait PINAN SANDAN juste pour me prouver que je pouvais le faire sans tomber ou vaciller.

C’est entendu, le karaté est le plus beau des arts martiaux, mais si tu devais en pratiquer un autre, cela serait ?

[S] Réponse à plusieurs niveaux.

S’il s’agit de savoir quel art martial me ferait du bien, c’est clairement l’aïkido ou le judo, parce que je déteste tomber et qu’il faudrait que j’apprenne.

S’il s’agit de savoir quel art martial m’attire pour des raisons frivoles de chiffons et costumes, c’est évidemment l’aïkido, mais aussi n’importe quelle forme de kung fu parce que je surkiffe leurs belles tenues.

S’il s’agit de mes rêves et de l’art martial que je pratiquerai dans une vie future quand je me serai réincarnée en un chat agile et élégant, n’importe quel art martial avec saut et envols.

Si je suis (un peu) plus réaliste, je suis attirée d’une part par la boxe d’autre part, d’autre part par la lutte et donc peut-être des arts martiaux qui s’en rapprochent

Mais, en fait, je suis bien d’accord avec la personne qui a posé cette question : le karaté est plus beau des arts martiaux.

Pratiques-tu, ou as-tu pratiqué, un autre sport ? Quel lien (ou quelle absence de lien) avec le karaté ?

[S] J’ai fait du basket dans ma jeunesse, du badminton, que j’ai adoré et adore toujours, à l’âge adulte, et j’aime beaucoup nager longtemps, dans la mer de préférence, dans du chlore sinon.

Le premier lien avec le karaté que je vois, c’est que je suis douée dans aucune de ces pratiques, mais que j’y mets néanmoins la même énergie et le même enthousiasme.

Depuis que je fais sérieusement du karaté, c’est-à-dire depuis que j’en fais à Niji-Kan, la natation en piscine est curieusement devenue moins ennuyeuse car je pense à ce que je fais avec mon corps, alors qu’avant je pensais juste que je m’ennuyais. (Non je n’essaie pas de passer la hanche en crawlant, mais qui sait, un jour peut-être ?)

Ressemblance évidente entre le badminton et le combat de karaté : ne pas regarder son bras mais, dans un cas, le volant, dans l’autre, les yeux de son adversaire. En revanche, à ce que je sais, il n’est pas recommandé de regarder les yeux de son adversaire en badminton…

Du basket, je regrette le plaisir de lancer ou de recevoir un ballon : on pourrait peut-être inventer une forme de baskaraté ? On se déplacerait en zenkutsu dachi tout en dribblant, puis arrêt shiko dachi, retrait en neko ashi dachi et tir : je le sens bien.

Ou bien faire du karaté aquatique ? J’aimerais beaucoup.

Faire de la musique ou chanter, peindre, écrire, filmer etc. Quelle activité artistique, selon toi, s’accorde le mieux avec la pratique du karaté ?

[S] Le piano parce que seul un travail lent, au ralenti, peut conduire à la maîtrise (et parce qu’il faut détendre les épaules…)

Le chant parce que l’énergie vient du ventre et surtout pas des épaules, et parce qu’on arrive à rien sans détente, alors qu’on croit, quand on débute, qu’il faut y mettre de la force.

Enfin, depuis que je fais du karaté, je regarde différemment et moins bêtement les spectacles de danse.

On est mardi, ou vendredi, Il est 19h, l’heure de se préparer pour l’entraînement de karaté : comment te sens-tu ?

[S] 19h ou plutôt 18h30 : début d’une longue négociation entre moi-même et mon corps

Mon corps : Chuis fatigué, j’ai froid (ou j’ai chaud, ça dépend), j’veux pas y aller, je veux rentrer à la maison et pas bouger.

Moi : Tu as encore oublié : là tu ne veux pas, mais quand ça va commencer, tu seras très content.e, et après tu te sentiras très bien !

Mon corps : Je vois pas de quoi tu parles. On rentre à la maison

Moi : Tu n’as aucune mémoire.

Mon corps : En plus je me sens pas très bien, me demande si on a pas chopé un virus, et puis j’ai encore des courbatures de l’autre fois et si ça trouve le dojo va être fermé et…

Moi : Bon, ça suffit la comédie : on y va.

Mon corps : peuuuuuuuuuuf

Moi : Allez, si tu fais pas d’histoire, il y aura une surprise après !

Mon corps : Une surprise qui se mange et qui contient du chocolat ?

Moi : Tu verras bien… Mais tu sais, je voulais te dire, tu t’en sors pas si mal pour un corps de ton âge.

Mon corps : Tu essaies de m’avoir à la flatterie là.

Moi : J’essaie de te distraire. Descend du métro, on est arrivé.

Mon corps : Bon… Si tu le dis

Moi : Tu vas voir, ça va être bien.

Mon corps : Elle est pas fermée, la porte du dojo, là ? Tu as vérifié What’s app ? C’est pas annulé ?

Moi :  Mets ce kimono et salue. Ça commence

Mon corps : ah ben c’est pas si mal, en fait

Moi : qu’est-ce que j’avais dit ?

Si tu étais un kata, cela serait lequel ? (Tu as le droit de nommer un kata que tu ne maîtrises pas encore !)

[S]  PINAN GODAN… Je ne sais pas pourquoi ,mais j’y reconnais quelque chose de moi ! Et puis NIPAÏPO (que je maîtrise encore moins que PINAN GODAN) parce que j’aime bien me lustrer les plumes

Si tu étais une technique de défense ? Et une technique d’attaque ?

[S] Shuto uke et gyaku tsuki

Nous récitons à la fin de chaque séance les « principes du dojo » (Les principes du dojo – Niji-Kan Karaté-Do). Est-ce qu’il y en a un que tu préfères ?

[S] Hitotsu nintaï, la patience parce que j’en manque (de patience).

Hitotsu yuki, le courage parce que j’en ai (du courage).

Hitotsu sozo, la création parce que je voudrais bien comprendre ce que c’est au karaté

Hitotsu reigi, la courtoisie, parce que la courtoisie est le plus noble des boucliers humains.

Où rêverais-tu de pratiquer ?

[S] C’est très simple : un dojo avec de grandes vitres qui donneraient sur la mer. Et après chaque entraînement, direct dans l’eau !

As-tu un message ou un conseil à faire passer depuis le futur au jeune ou à la jeune ceinture blanche que tu as été ? Et si tu es encore ceinture blanche, as-tu un message à te faire passer ?

[S] On va beaucoup te corriger, te critiquer. Chaque fois qu’on le fera, dis-toi que c’est un honneur et la preuve qu’on veut te voir progresser (et arrête de faire ta mauvaise tête de bonne élève, vexée de pas tout réussir du premier coup).

Qui ne connaît pas Niji-Kan ! Mais tu l’as connu comment notre club ?

[S] Eh bien, en cherchant où on faisait du karaté lgbt et j’ai trouvé !

Niji-Kan, à part le meilleur club de karaté au monde, c’est quoi pour toi ?

[S] Je crois que je n’ai pas encore pris la mesure tout ce que Niji-Kan représente pour moi, mais pour l’instant je sais que c’est un endroit où on me veut du bien, et c’est vraiment pas mal.

Karaté Kid ? Petit Panda ? Ours flexible ? Gazelle énervée ? Est-ce que tu as un surnom secret que tu te donnes quand tu pratiques ? Et sinon, c’est peut-être l’occasion de t’en créer un : promis, on ne le répètera pas !

[S] Alors j’hésite entre Panda Pataud et Taureau Impétueux, mais je me dis que Taureau Pataud et Panda Impétueux, c’est bien aussi !